Si on veut absolument bâtir des ponts entre ce film et le reste de la filmographie de Hitchcock que tout bon cinéphile connait à peu près sous le bout des doigts, disons qu'il y a un peu du FAUX COUPABLE là-dedans, et pas mal du GRAND ALIBI d'Agatha Christie, qu'Alfred adaptera en 1950 avec la divine Marlène Dietrich et Charles Laughton: le crime se déroule, là aussi, dans le milieu du théâtre avec, par conséquent, des suspects qui sont aussi comédiens et savent très bien faire semblant. La coquetterie de MEURTRE, c'est qu'après la condamnation de la pauvre jeune fille victime de son trou de mémoire, un seul membre du jury, qui dans un premier temps avait été le seul à voter contre sa culpabilité, décide de refaire l'enquête, pleine de trous aussi large que le gouffre de Padirac. Et cet homme, attention, est un grand metteur-en-scène de théâtre qui va user de certaines ficelles du métier pour faire éclater la vérité.
De sa période britannique, on préférera sans l'ombre d'un doute JEUNE ET INNOCENT, SABOTAGE, LES 39 MARCHES et d'autres. Mais les historiens du cinéma semblent être sûrs que c'est dans ce film que fut utilisé pour la première fois le procédé de la voix-off pour dévoiler les pensées intérieures d'un personnage (après tout, Hitch qui venait du muet, n'avait fait que remplacer les intertitres par cette astuce).
Je retiendrai, moi, la toute première scène du film, un long travelling somptueux sur les fenêtres du premier étage d'un immeuble: quelqu'un pousse un cri, des portes claquent, on appelle à l'aide, des gens ouvrent leurs fenêtres, ainsi on découvre plusieurs protagonistes de l'histoire qu'on va suivre, et puis un couple, elle avec un décolleté très avantageux pressé contre la rambarde. Suivi de plans à l'intérieur de la chambre: lui, dont on ne comprenait rien à ce qu'il disait, file remettre son dentier. Elle, une jolie blonde, évidemment, lui dit qu'elle arrive, et enfile sa culotte avec beaucoup de mal, par-dessous sa chemise de nuit.
Tout est déjà là: la rigueur technique, le génie du découpage, la perversité bonhomme d'un type qui, c'est bien connu aujourd'hui, n'en ratait pas une.
Cela vient juste de sortir, c'est réalisé par Dave Dobkin, cinéaste qui bouffe absolument à tous les râteliers, mais qui a quand même été fautif d'un hilarant SERIAL NOCEURS (avec Vince Vaughn et Owen Wilson), dont je me rappelle quelques glorieux moments. Nous sommes donc dans la comédie régressive post-Farelly, Apatow et consorts, un genre très américain qui a su produire, surtout dans les années 90, quelques beaux morceaux de bravoure assez... couilles-bites-chattes, comme disait Chabat.
A la course à l'Eurovision, donc, nous voici en Islande où Lars et Sigrit, amis d'enfance, forment un duo pop qui joue tous les samedis soirs dans la même taverne de pêcheurs. Jamais remis de la victoire d'Abba au prestigieux concours, les deux amis sont choisis par leur pays, sur un malentendu bien évidemment, car ils sont vraiment mauvais, pour le représenter à l'Eurovision.
J'ai du rire deux ou trois fois, quand même: la première lors de ce qui ressemblait à un rire nerveux, quand j'ai entendu "Semence et Garfunkel" (on ne peut pas faire plus débile), la seconde lorsque, enfin, on reconnait Will Ferrell et son humour de Panzer lorsqu'il se met à gueuler sur ses "connards d'Américains de merde" (on se souvient que Ferrell était l'imitateur en chef de Bush Jr, et lui taillait des costards rapiécés à peu près chaque semaine), mais ces deux éclairs, tout comme le bonheur de voir Rachel McAdams (que j'adore, et pas seulement parce qu'elle c'est une jolie fille...) ne sauraient escamoter le naufrage.
En cause, Will Ferrell qui semble un peu souffrir d'arthrose, et dont les cascades foirées font à peine sourire. Et faute de renforts dans les situations et les dialogues, sa fameuse tête-de-con-sourcils-froncés fait chou blanc. Il n'est jamais drôle et ça, on ne s'y attendait pas du tout.
Encore plus emmerdant, la condescendance avec laquelle est traitée l'Islande (en gros, des boeufs qui boivent des bières et ont des goûts musicaux de chiotte, et qui sont tous les enfants illégitimes d'un seul homme), avec ces insinuations lourdes, ici ne passent pas. Pourtant sur RongemailleBlog, on n'est pas chochotte avec le politiquement incorrect, mais ça ne va pas suffisamment loin dans l'outrance pour nous faire pouffer. Rendez-nous LES ROIS DU PATIN, SUPERGRAVE, SERIAL NOCEURS et MARY A TOUT PRIX, nom d'un husky !
Les clichés sont tous là, mais bien rangés: beaucoup de gays dans le milieu du show-biz, trop de sourires plein de dents blanches et de bombes sexuelles qui se trémoussent sur de la musique de merde, et le film atteint son nirvana lors d'une scène qui a failli me faire sortir, où les protagonistes d'une giga-teuf improvisent une reprise electro-disco de "Waterloo" en se passant le relais (on y reconnait les abominables Laureen, Conchita Wurst et Bilal Hassani, et tout plein d'inconnus de moi, certainement célèbres mais qui braillent plus fort les uns que les autres).
Et ça dure deux heures... Si Neteuflix parvient aussi à aseptiser les comédies vulgaires qui me font tant marrer, c'est que son entreprise de ripolinage commence à porter dangereusement ses fruits. Avec ces gens-là, bientôt, les chattes et les bites n'auront plus aucun goût.
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