mercredi 10 juin 2020

Nos bouts de vie à nous.


Petite forme aujourd'hui, avec un film gore pas mal dégueu et complètement raté, signé par un certain Kerry Pryor, THE REVENANTS, réalisé en 2009 et qui n'a absolument rien à voir avec le gros machin boursouflé de Innaritu. Quoi qu'est-ce ? L'histoire d'un pauvre gars abattu quelque part du côté de Falloujah, rapatrié à Los Angeles dans une boîte, et qui faute d'avoir été mal enterré, revient chez lui et plus précisément chez son colocataire, un sacré pauvre type. 

D'abord, on attend une fable à la Joe Dante auquel l'excellent HOMECOMING, dont le point de départ est le même, fait un peu penser. Pas du tout; une fois la première stupeur passée, le film s'enfuit vers le film de super-héros crado (notre Bart, qui ne peut pas mourir une deuxième fois, se fait justicier de la street en rétamant des voyous, avant de boire leur sang) au rythme d'un film d'horreur à la cool comme a su en faire ce bon Simon Pegg et sa bande de Benny Hills (genre SHAUN OF THE DEAD), sauf que ça ne fait pas rigoler un seul instant.

Et puis THE REVENANTS enchaîne les rebondissements de plus en plus pénibles (il contamine son pote), et les scènes gore de plus en plus trash qui finissent par se regarder avec une indifférence de bouffeur de pop-corn. Et puis THE REVENANTS n'en finit pas d'en finir et, sur ce point, on suspecte Kerry Pryor d'avoir voulu lorgner du côté de John Landis, - qui avait réussi un drôle de film de buveur de sang déviant, lui, le méconnu et mal-aimé INNOCENT BLOOD -, lors d'un final au sortir d'une station de métro pompée sur la scène  mythique du LOUP-GAROU DE LONDRES.

Mais, ni Joe Dante, ni John Landis, et encore moins Tobe Hooper, Kerry Pryor a peut-être du croire qu'il pourrait être le Richard Kelly du film gore sur ce coup-là, et son REVENANTS devenir son DONNIE DARKO trash à lui. Pour cela, il aurait fallu une histoire qui se tienne et, surtout, des comédiens qui aillent bien: impossible de ne pas soupirer devant le piètre David Anders qui accuse un handicap de taille: il est le portrait craché de Rémi Gaillard.

Mal gaulé, pas drôle, le film se termine sur un truc qui se voudrait une boucle avec son point de départ, mais non, du début à la fin, on peut le dire: c'est nul.


Chose promise, chose due, je suis retourné dans les draps blancs du cinéma de Angela Shanelec. NACHMITTAG (2007) est librement inspiré de Tchékhov (Oncle Vania ?), transposant la datcha de campagne en lieu de villégiature auprès d'un lac près de Berlin. Un jeune couple, des parents divorcés, un père dépressif et de méchante humeur, une mère comédienne de théâtre (incarnée par Shanelec elle-même) un peu borderline et son nouveau compagnon.

On admire ici la facilité avec laquelle la cinéaste crée de l'électricité dans l'air estival: dialogues de sourds, inimitiés qui se cachent mal, on passe quelques heures au calme entre ennui de vacances (des parties de Uno pour faire passer le temps), silences lourds de sens et quand les personnages se parlent, c'est bien souvent pour ne pas s'écouter, la tête ailleurs.

Parfois, ça cingle sans crier gare:

  - Oh toi, tu es prêt à dire une vacherie... vas-y, dis ce que tu as en tête.
  - Tu as toujours été une charogne.

Voilà, il ne fallait pas demander.

Difficile de parler avec exactitude du style d'Angela Shanelec. On n'a pas envie de battre le rappel de ces épouvantails que ce sont Antonionni (ah ! l'incommunicabilité...), encore moins de Rohmer (ça a du mal à gazouiller, et même parfois à s'exprimer, ici), mais ce cinéma de poche, ce cinéma de chambre a aussi ses fenêtres ouvertes vers quelque chose de plus léger, de plus doux. Quelque chose qui ressemble à nos bouts de vie à nous.

Voilà, j'ai trouvé (grâce à ce "bout de vie à nous"): le cinéma de Shanelec, ça pourrait être "Ultra moderne solitude" chanté par Souchon. Cruel, mais doux...

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