dimanche 21 juin 2020

Un grand petit homme.


Ian Holm est mort hier, à un âge respectable mais bon: je l'aimais tellement cet acteur, - un des plus grands seconds rôles du cinéma anglo-saxon, depuis ces débuts chez Terry Gilliam et Ridley Scott à la fin des années 70, que ça m'a rendu tout chafouin. Et comme quoi le hasard, peut-être, ça n'existe pas, je me suis décidé à voir ce Sidney Lumet dont j'avais à peine entendu parler, - et pour cause, il n'est pas terrible - où notre immortel Nash, notre Philippe d'Arnault à nous, Ian Holm en personne incarne un vieux flic. Et je ne savais pas qu'il était dedans, dis donc.

Malgré tout le talent du grand petit homme (1m65), avouons que Holm n'est pas crédible une seconde en flic new-yorkais qui termine chacune de ses phrases en mâchant son chewing-gum d'un air de dur à cuire. D'autant qu'il fait équipe avec un jeune policier incarné ici par.. James Gandolfini, ce qui donne le buddy-movie le plus improbable, et le plus bancal, de l'histoire des tandems. C'est secondaire, mais DANS L'OMBRE DE MANHATTAN , qui date de 1996, semble avoir été conçu autour d'Andy Garcia, alors promis aux étoiles et au-delà. Dommage que la suite n'ait pas confirmé son statut de star, car Garcia possédait vraiment un énorme talent, le regard noir le plus intense et le sourire le plus sexy des hidalgos alors en lice, avec beaucoup de poils sur le torse.

DANS L'OMBRE... n'est pas un mauvais film, mais Sidney Lumet en avait déjà réalisé trois autres autrement plus forts sur la corruption policière: parmi ses grands films, on y trouve par exemple SERPICO, LE PRINCE DE NEW YORK ou CONTRE-ENQUETE. Grand spécialiste des films de prétoire, Lumet commence par ça: le procès d'un roi de la mafia tueur de flics que le jeune procureur général aux dents longues cloue au piquet sans l'ombre d'un problème. Mais si le procès a été si facile, ça n'était qu'un prétexte pour l'avocat du truand (Richard Dreyfuss, il y a toujours de bons acteurs chez Lumet...) pour soulever un autre lièvre: la corruption qui règne en sous-main dans pas mal de commissariats de la ville.

C'est sérieux, bien empaqueté, inspiré d'un roman de Robert Daley bien documenté (L'ANNEE DU DRAGON, c'était lui) mais qu'on a vraiment l'impression d'avoir déjà vu quelque part. Là où on sent quand même que Lumet n'est pas plus intéressé que ça par son film, c'est dans la relation improbable entre le procureur Garcia et l'adjointe de la défense (Lena Olin) dont on ne comprend pas pourquoi ils se retrouvent au plumard, et quelle utilité cela recèle pour le reste de l'histoire.

Mais bon, Ian Holm est mort. Après Max von Sydow et Michel Piccoli, il ne manquerait plus que Gary Oldman rate un virage et je ne saurai plus sur qui porter mes admirations déraisonnables.

Mubi possède à son catalogue quelques films de Kzrysztof Zanussi, un cinéaste polonais très important qui a beaucoup moins fait parler de lui chez nous, que d'autres de sa génération (Wajda, Polanski, Zulawski, Kieslowski, Holland); c'est son troisième film que je vois, et c'est vraiment très très bon. Après les drames "existentialistes" ILLUMINATION et STRUCTURE DE CRISTAL, voici MAXIMILIAN KOLBE (Life for life) qui date de 1991.

Si vous voulez voir un film avec Christoph Waltz en prisonnier de camp de concentration (moment de consternation vite oublié au bout de quelques secondes, mais quand même), et découvrir surtout l'histoire de ce Max Kolbe, allez jeter un oeil sur ce moment terrible de l'histoire de la Shoah (comme une infinité d'autres), qui a beaucoup marqué les consciences en Pologne.

Il y est question de foi, d'esprit de sacrifice, c'est un film où on prie beaucoup, où on s'agenouille sans cesse afin d'expier ses fautes, réelles ou inventées. Béatifié en 1982 par Jean-Paul II, Maximilian Kolbe était un prêtre dont la vocation pouvait paraître surnaturelle à ceux qui l'ont approché, et qui s'était proposé pour mourir au camp d'Auschwitz-Birkenau à la place d'un de ses compagnons, tiré au sort avec neuf autres malheureux en représailles à l'évasion d'un prisonnier. 

Le film est excellent, même si on lui préférera les deux autres films cités plus hauts, beaucoup moins classiques dans leurs formes, et évidemment moins sulpiciens que ce film édifiant. Les Polonais ont véritablement quelque chose de viscéral avec la religion catholique, tout comme ils portent une culpabilité incroyable sur leur histoire pendant la seconde guerre. C'est quelque chose qui peut se comprendre. Au personnage de Waltz (le prisonnier enfui en question), qui ne cesse de se morfondre, et de battre sa coulpe parce que las d'entendre autour de lui que dix hommes, dont le père Kolbe sont morts "à cause de lui", on a envie de hurler que sans ça ils seraient sans doute morts quand même, et lui aussi. De le prendre par le colbac et de le secouer un peu. Ah ! ces cathos...


Exécution au lance-pierre d'un film regardé d'un coin d'oeil navré, à un moment de profonde lassitude, CHERE MARTHA d'une certaine Sandra Nettelbeck qui nous conte le décoinçage d'une chef d'un grand resto au contact, d'abord de sa nièce brutalement devenue orpheline après l'accident mortel survenu à sa mère; ensuite de l'arrivée d'un chef en second, Italien et très déconstasté, philosophe de la cuisson des pâtes qui fait rissoler ces oignons et sauter ses crêpinettes sur du Paolo Conte.

La Martha a beau l'air être très collé-monté, la jeune femme derrière un chignon sévère et une vie réglée comme la cuisson d'un turbot à l'arête, cache non seulement un très joli minois et bon sang de bonsoir, elle est célibataire. Et comme notre histrion al dente est incarné par l'irrésistible Sergio Castellito, son joli bagout, son accent de là-bas et son grand nez, ça ne fait évidemment pas un pli.

Mieux gaulé que le pire épisode de Top Chef, mais avec moins de suspense, ce feel-good movie aux morilles déglacé au xérés manque de pas mal d'ingrédients pour empaqueter le vieux ronchon que je suis au fond de son panier à provisions. Si le mélo nous touche un peu à deux ou trois moments (la gamine qui n'arrive pas à se remettre, mais heureusement l'ami Sergio sait parler aux enfants - les pâtes, toujours), il est assez pénible sur d'autres versants: les Allemands ont toujours eu du mal avec l'humour, et les épisodes "Martha chez le psy" qui lorgnent un peu sur Woody, ne sont pas drôles du tout, mais risibles, ça c'est sûr.

Ah et puis, je ne vous l'ai peut-être pas dit, mais Ian Holm est mort. 
Fait chier.

ici dans ESTHER KAHN d'Arnaud Desplechin où il incarne un grand professeur de théatre qui est aussi... un mauvais acteur.







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